En parcourant quelque peu la France ces dernières années dans le but d’enrichir mes connaissances sur les savoir-faire ancestraux et écologiques, j’ai visité beaucoup d’éco-lieux, de sites associatifs, de woofing et de chantiers participatifs.
C’est à chaque fois une expérience extraordinaire, autant pour les rencontres, les moments conviviaux partagés et les connaissances acquises. Cependant, si je devais émettre une fausse note, ma critique porterait sur la tenue esthétique d’une partie de ces sites composés d’infrastructures ou de zones qui manquent véritablement d’entretien et de soin.
Je pense par exemple à la ferraille qui traine dans le jardin, aux déchets plastiques ou encore au mobilier quelque peu décharné utilisé pour accueillir les woofers/stagiaires/bénévoles etc. Je vois trop souvent par exemple des tables construites à la va vite composées de résidus de palettes reposant sur des pneus ou des douches extérieures pas tout à fait hygiéniques construites avec deux bouts de tôle et des paravents en plastique. Et cela me pose deux problèmes vis à vis de l’image renvoyée au reste de la population, non acquise à la cause environnementale :
Pb n°1- cela produit dans l’esprit commun une association très dommageable entre projets alternatifs/conscients/écolos/nature et inconfort. Inconfort par l’impression d’un manque d’hygiène, de rigueur, de soin et d’organisation. Or cela va de soi mais je crois que l’on convainc mieux en montrant que l’on peut produire du beau et du carré dans une société qui s’harmonise avec son environnement.
Pb n°2- le fait de trop souvent utiliser des produits industriels complexes neufs ou de réemploi (tels que des pneus) donne l’impression que tout projet alternatif reste tout de même hautement dépendant à notre société actuelle et donc en quelque sorte une utopie.
Vous m’objecterez volontiers que cette préconisation est chronophage. Car il suffit d’une heure et d’un être humain pour fabriquer à l’aide d’outils modernes une table en palettes avec des pneus, à l’inverse d’une table en bois traditionnelle fabriquée à la main.
À cela je répondrai en quatre temps :
1- si l’on réalise une table destinée à accueillir plusieurs personnes pour prendre par exemple des repas, il me semble tout à fait logique de convier quelques camarades pour la fabrication. Autrement dit, remplaçons la force énergétique des machines actuelles par la force du collectif (j’écrirai d’ailleurs un article sur ce point avant la fin de l’année). Appelez donc quelques amis, vous vivrez une expérience fort sympathique, drôle et enrichissante et à la fin vous aurez une super table, beaucoup plus solide que la table en palettes. Si vous n’avez pas d’amis, il est toujours possible de faire moins mais mieux. Un petit espace bien agencé, propre et esthétique est plus impactant qu’un grand terrain chargé d’infrastructures bancales.
2- Pour faire écho au problème majeur que j’évoquais en début d’article sur la nécessité de rendre attractif ce genre de sites, je peux vous garantir la qualité de l’effet produit sur les visiteurs d’une belle table en bois faite main de A à Z.
3- Je peux également vous garantir l’effet d’autosatisfaction produit sur les concepteurs mêmes de l’ouvrage en passant chaque jour devant la table.
4- Enfin, la réalisation manuelle, à l’énergie du corps, en harmonie avec les ressources et le cycle de vie de notre nature locale me semble en valoir la chandelle.
Bien entendu, loin de moi l’idée d’affirmer que tous les éco-lieux souffrent de ce défaut. D’ailleurs, le site que j’ai trouvé le plus satisfaisant en termes de propreté, de rigueur et d’esthétisme est le château de Guédelon (reconstitution d’un château du XIIIème siècle avec uniquement des techniques médiévales). Pas un papier qui traine, que ce soit sur le chantier ou dans les coulisses, des processus de fabrication toujours soignées et des matériaux nobles à toutes les étapes de création. C’est un exemple que je tente de suivre au sein de notre jardin pédagogique.