La pire association qui soit
Avoir associé l’écologie dans l’imaginaire collectif à tout un paradigme de privations est peut-être l’une des entreprises les plus délétères de notre siècle.
Car oui, l’écologie dans l’esprit du commun des mortels c’est la prescription d’un lot de contraintes qui affectent la vie quotidienne. Au programme, consommer moins de viande, arrêter de prendre l’avion, acheter moins de vêtements, moins de produits de consommation etc.
Moins, moins, moins, toujours moins !
Ma vision du sujet est radicalement différente. Je suis bien plus épanoui et libéré dans ma vie depuis que je tente d’harmoniser mon quotidien sur le plan écologique. Laissez moi quelques minutes pour vous en expliquer les raisons.
La contrainte créatrice ?
J’ai choisi d’approfondir les 2 premiers exemples précités pour expliquer cette notion de contrainte créatrice, à savoir la consommation de viande et l’avion.
Commençons par la viande.
Je ne vais pas développer ici les raisons qui font de la baisse de consommation de viande un des leviers principaux du combat écologique à l’échelle individuelle, d’autres ont déjà pris ce soin comme par exemple Major Mouvement dans cette vidéo qui je trouve est très bien faite, nuancée et non moralisatrice.
Je veux simplement confronter les contraintes principales évoquées au sujet de cette prescription, à savoir la perte de goût en cuisine et le manque de protéines induits dans l’alimentation.
Pour répondre à ces deux problématiques, j’ai creusé le sujet de la diététique pour identifier nos besoins nutritifs et la manière dont ils s’articulent au quotidien. J’ai alors notamment tenté de comprendre le rôle précis des protéines, des lipides et des glucides pour notre corps ainsi que l’intérêt de l’équilibre de ces 3 grandes composantes. Ce premier cheminement m’a permis de percevoir les aliments non plus simplement pour leur goût mais aussi pour leurs apports.
Résultat des courses (attention énorme spoil), OUI effectivement, la viande est relativement bien dotée en protéines et ces dernières sont indispensables au bon fonctionnement du corps. Voilà, merci bonne journée !
À l’aune de ce constat, une alarme d’incompatibilité s’est déclenchée dans mon cerveau. Eh bien oui réfléchissez avec moi, nous pouvons actuellement manger des quantités astronomiques de viande chaque année uniquement en raison du système d’élevage industriel qui fait vivre chaque année des milliards de poules sur des surfaces équivalentes à des feuilles A4 sans jamais voir la lumière du jour. Or ce système est extrêmement récent à l’échelle de l’humanité en raison de sa complexité et de sa dépendance aux énergies fossiles. Comment faisaient donc nos ancêtres pour survivre sans un apport aussi constant de viande ?
Je me suis donc penché sur la question et le constat est sans appel, aucun peuple dans le passé n’a égalé notre consommation de viande par personne (euphémisme), qu’il s’agisse de nos grands parents, de la France médiévale ou encore de nos ancêtres au Néolithique*.
Mais alors comment faisait-on pour avoir le juste apport de protéines ?
Il y a (deuxième spoil) plein d’autres sources de protéines dans la nature.
On peut citer le lait, le fromage ou encore les œufs mais historiquement c’est aussi et surtout les légumineuses (pois chiche, haricot, fève, pois, soja, lentilles etc.) qui figurent parmi les arguments de choix avec un taux compris entre 20 et 30 % de protéines, taux par ailleurs équivalent voire supérieur à celui de la viande.
Nos ancêtres l’avaient bien compris et cultivaient donc, en parallèle des céréales, tout un tas de légumineuses pour compléter leur alimentation.
Bon, la problématique liée à la santé est donc résolue, nous pouvons vivre en parfaite santé en diminuant notre consommation de viande. Et si vous n’êtes pas encore convaincu je vous invite à vous pencher sur le régime alimentaire de certains sportifs de haut niveau comme Novak Djokovic par exemple.
Qu’en est-il du goût à présent ?
Eh bien de la première réponse découle la deuxième. En prenant conscience des sources alternatives de protéines, j’ai découvert un univers gastronomique absolument fascinant, autrement dit des recettes délicieuses conciliant à la fois le goût et l’apport en protéines avec les diverses sources alternatives mentionnées plus haut. Allez, pour le plaisir, voici un lien de recettes pour vous régaler les papilles : https://menu-vegetarien.com/cuisine/legumineuses/
En résumé, la contrainte initiale de la baisse de consommation de viande m’a ouvert les portes de tout un pan de la gastronomie en me permettant au passage de comprendre le fonctionnement de l’alimentation et les moyens d’équilibrer un plat.
Résultat :
1- mon rapport à l’alimentation est bien plus écologique
2- je comprends mieux les rouages de l’alimentation
3- je m’éclate en cuisine
4- je mange beaucoup plus sainement
C’est donc ça, la contrainte créatrice.
Et si vous êtes des irréductibles inconditionnels de la viande, je vous invite à regarder l’épisode 2 de la saison Top Chef 2024 autour des trompe palais végétariens. Sur l’ensemble des amateurs de viande qui goûtent à l’aveugle les plats végétariens préparés, 100 % d’entre eux sont certains de déguster de la viande.
Un deuxième exemple pour la route afin d’être sûrs de bien comprendre le concept ?
Je pense que le sujet de l’avion est un superbe cas d’usage de toute la frustration exprimée à l’égard de l’écologie. Nous sommes donc d’accord qu’il s’agit là aux yeux du commun des mortels d’une véritable contrainte de ne pas pouvoir aller à l’autre bout du monde en moins d’une journée. Même si certains m’objecteront que c’est un problème de riches car seuls 10 % des habitants de cette planète ont l’habitude de prendre l’avion*.
Alors comment transformer cette contrainte en plaisir ?
Marcel Proust a dit quelque chose d’extraordinaire à ce propos : « Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux. »
Je me permets de transposer cette citation pour l’appliquer à notre cas de figure en affirmant qu’il existe une infinité de voyages qui remplissent l’âme sans avoir besoin de parcourir des dizaines de milliers de km.
Voici quelques exemples d’expériences qui permettent de repenser notre perception du voyage :
– Une descente de fleuve en canoë sur la Loire avec des arrêts bivouac, des pêches improvisées et des visites de châteaux.
– Pour les sportifs, un road trip à vélo ou à pied avec un objectif final (comme partir de Lyon avec l’idée de déguster une tropézienne à Saint-Tropez ?) ou bien alors une semaine d’initiation à la voile, à l’escalade, au surf !
– Un voyage en Dordogne sur le thème de la préhistoire avec une initiation aux savoir-faire primitifs pour toute la famille.
– Prenons même des exemples encore plus farfelus et créatifs. Admettons que vous êtes un fan de Napoléon (comme mon petit frère, chacun ses passions), organisez vous un voyage qui retrace son parcours en Europe et plongez dans l’histoire en passant par les lieux symboliques de son épopée : Austerlitz, Iéna, Waterloo etc.
– Un bain dans l’Estérel dans le sud-est de la France qui donne l’impression d’être dans le Grand Canyon aux États-Unis.
– La montagne en été avec des baignades dans les lacs.
– Vivre une expérience paysanne de woofing dans un village en Espagne.
– Aller à l’opéra en Autriche
– Faire la fête à Berlin.
Bref, vous l’aurez compris, déjouer la contrainte de l’avion par la créativité permet de composer des vacances originales et enrichissantes.
Bon, des exemples de contrainte créatrice, j’en ai à la pelle : l’auto satisfaction de fabriquer ses produits ménagers soi-même pour ne pas acheter de produits chimiques nocifs (ce qui permet au passage d’enrichir sa connaissance en chimie), économiser un paquet de sous en achetant des vêtements de qualité en seconde main, concevoir un potager et apprendre à cultiver pour disposer de légumes maison de qualité, découvrir la richesse de la nature locale et de ses usages écologiques du quotidien (oui bon on ne se refait pas, vous êtes sur le site du temps des savoir-faire hein).
Je vais même vous dire quelque chose, la « contrainte » écologique, au delà d’être une source de créativité, est à certains égards une véritable libération. Laissez moi quelques minutes pour vous expliquer cette dernière phrase.
Trop de choix oppresse le choix
Dans des travaux de composition comme l’écriture d’un scénario au théâtre ou la construction d’une maquette en architecture, l’absence d’astreinte est paradoxalement un facteur contraignant. Autrement dit, avoir une liberté totale sur le choix du sujet n’est pas systématiquement favorable à la création. Toutes les options étant possibles, le créateur se demande en permanence si l’herbe ne serait pas plus verte avec un autre axe de départ, ce qui peut finir par égarer son esprit.
Il en va de même pour l’écologie. Si vous décidez de vivre au sein de notre société actuelle sans inclure le paramètre environnemental, un nombre incalculable d’options s’offrent à vous en permanence. Comment choisir ses produits alimentaires au supermarché parmi les milliers de marques existantes au marketing toujours plus aiguisé ? Si vous en avez les moyens, pourquoi ne pas aller vivre à Hong-Kong, au Pérou, à Miami, ou non même à Hawaï ? Pourquoi ne pas acheter les millions de nouveaux vêtements de la mode du jour qui se renouvelle en permanence ?
À mon sens, intégrer la dimension écologique dans notre rapport au monde permet de toucher terre en conférant aux différentes options possibles de vie une échelle humaine et plus apaisante pour l’esprit.
Pour résumer mon propos, entretenir une quête écologique permet selon moi de (re)trouver :
- du sens dans nos vies
- de la joie
- de l’enrichissement intellectuel
- un apaisement de l’esprit
Bonne journée à tous ❤️
*En prenant le cas de la France, même sans remonter très loin dans le temps, nos arrières grands parents au début du XXème siècle mangeaient en moyenne quasiment deux fois moins de viande qu’à notre époque, 48kg contre 85kg par an. Si l’on remonte un peu plus loin, on estime que la consommation annuelle par habitant au Moyen-Âge gravitait autour de 25 kg / personne, soit 3,4 fois moins. Et si l’on remonte encore plus loin, au Néolithique, le ratio de viandes/poissons pour un certain nombre de peuples était même assez bas et oscillait entre 10 % et 30 % contre 70 % d’aliments végétaux.
https://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_2002_num_80_4_4680 (page 4)
https://books.openedition.org/cvz/5429?lang=fr
https://archeologie.culture.gouv.fr/palafittes/fr/les-especes-cultivees#:~:text=Les%20plantes%20alimentaires,%C3%A9volution%20du%20couvert%20v%C3%A9g%C3%A9tal%20naturel. https://www.rts.ch/decouverte/monde-et-societe/histoire/4639494-que-mangeaient-les-gens-du-neolithique.html
* https://bonpote.com/10-chiffres-a-connaitre-sur-lavion-et-le-climat/#3_80_de_la_population_mondiale_na_jamais_pris_lavion